La Société Psychanalytique de Tours

et

L'Institut des Hautes Études en Psychanalyse

 

Journées de Tours
samedi 18 et dimanche 19 novembre 2006


La foi expectante

 

 

Cette expression freudienne "glaübigen Erwartung" inscrite dans l’article de 1905 De la psychothérapie n’est pas sans ambiguïtés. Mise entre guillemets dans le texte original, elle semble suspendue à une difficulté et peut-être une impossibilité de traduction. L’expression "foi expectante", retenue dans la traduction française, semble une équivoque qui permet à Sarah Kofman de questionner la pratique psychanalytique comme pouvant être une forme moderne du mysticisme. Si "die Erwartung" signifie bien "l’attente", "l’espérance" ou "l’expectative", l’emploi de "Glaübe" sous sa forme adjectivée ( glaübigen) ne semble pas permettre de traduire littéralement l’expression "glaübigen Erwartung" par "foi expectante". Freud en parle à propos de la suggestion utilisée par les méthodes médicales primitives : « …on commençait par mettre le malade en état de foi expectante… ». Il ne serait donc pas question ici de foi, mais de croyance, d’une «attente crédule», d’une « expectative croyante », disposition psychique caractérisant celle du patient faisant sa demande et à laquelle, comme le souligne Freud, il n’a nulle intention de renoncer .

Freud affirme, dans le même article, que la psychanalyse, loin de répondre à une telle demande, se propose de la régler, de la contrôler en y introduisant davantage de rationalité et d’efficacité. S’il ne rejette pas la psychothérapie, s’il affirme même au passage que nous en « faisons usage sans le vouloir », il montre d’ores et déjà la différence radicale qui sépare la psychothérapie de l’exercice de la psychanalyse. Peut-on dire, comme l’argumentera Lacan, dans son Discours aux catholiques, que Freud se conduit alors comme "un grossier matérialiste" ? A la "croyance crédule" ou "expectante", le maître de Vienne répond par le savoir de la science, de sa nouvelle science qui raisonnablement viendra prendre la relève du leurre "de la course des lévriers". Le transfert, cette "matière explosive", prendra la relève de la suggestion et de l’influence qu’elle continue d’avoir dans les psychothérapies. L’analyste, tel un chimiste, se verra confier le soin d’en entendre les résonances, d’en constater et d’interpréter ses manifestations, d’en être le destinataire sans en répondre personnellement. Ainsi serait née l’exigence de l’analyse de l’analyste. Ainsi, à la tentation de la "croyance", Freud répond par la tentation du savoir. Freud croit au savoir, donne crédit au savoir, à un savoir qui dans sa fiabilité ne se distingue guère plus d’un acte de foi. Derrida n’écrira-t-il pas que le recours au savoir est la tentation même …en un sens un peu plus singulier que celle du péché originel : « La tentation de savoir, la tentation du savoir, c’est croire savoir non seulement ce que l’on sait (ce qui ne serait pas trop grave), mais ce qu’est le savoir, et qu’il s’est affranchi, structurellement, du croire ou de la foi ».

La psychanalyse serait-elle alors "la réponse" à cette demande quasi religieuse, à cette "attente croyante" du patient ? Si oui, comment y répond-elle ? En quels termes responsables ? Au nom de quelle vérité ? Au nom de quelle raison-vérité ? Nous pourrions donc nous interroger pour savoir comment, dans un premier temps, la psychanalyse s’oppose au religieux ou à la religion, et surtout à la religiosité, ne serait-ce que par sa filiation aux Lumières, et comment dans un second temps – celui-ci raisonné – elle semble spontanément composer avec le religieux ; religion et raison ayant la même source. A moins, bien sûr, que la psychanalyse ne veuille répondre devant personne, ni même devant la raison psychanalytique, des actes qu’elle pose ? Se dire psychanalyste se soutiendrait alors uniquement de l’aporie de son exercice : dans ce cas alors, et seulement dans ce cas, l’expression freudienne "glaübigen Erwartung" resterait intraduisible, resterait elle-même en attente, dans "l’expectative".

 


Déroulement des Journées de Tours  2006


SAMEDI 18 novembre

 

8h30 – 9h 15  Accueil des participants.

9h15    Ouverture des Journées.

 

MATINEE :

Discutant : Thierry BEAUJIN (PARIS)

Président de séance : Francis CAPRON

 

9h30 – 11 h : Jean-Paul COOREN ( LILLE)

«A propos du transfert et de cette foi qui en soutient l’écriture»

 

11h15 - 12 h 45  Anne BOURGAIN (AMIENS, PARIS 13.)

«Il était une foi : la langue»

 

APRES-MIDI :

Présidente de séance : Chantal TALAGRAND 

 

14 h30-17h30 : Jean-Luc NANCY (PARIS)

  «De la croyance» avec René MAJOR comme interlocuteur.

 

18 h – 19 h30  Cocktail de bienvenue.


DIMANCHE 19 novembre

MATINEE  :

Discutant : Francis CAPRON (TOURS)

Président de séance : Manuel PEREZ

 

9h30  - 11 h : Jacqueline ROUSSEAU-DUJARDIN (PARIS)

«La gläubigen Erwartung freudienne : un aspect de la conquête psychanalytique… »

 

11h 15 - 12 h 45 : Jacques NASSIF (PARIS, BARCELONE) 

  «L’attente, l’oubli … de la voix»

 

APRES-MIDI :

Président de séance : Jacques GUIET

 

14h30 - 16 h Alain PAULAY  (TOURS)

«Du sujet tel qu’il apparaît dans l’énonciation des croyances»

16h15 – 17h45 : German ARCE ROSS (PARIS)

«Du deuil anticipé au désir incarné»


Inscription:

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