psychanalyse In situ


Un chemin

saverio tomasella

 

La fin de la cure psychanalytique à proprement parler, pour peu que cette fin soit décelable et précise dans le temps, ne met pas pour autant un terme à la réflexion qui habite l’être qui cherche un sens à sa vie, à partir du non-sens de l’existence et du chaos de son histoire.

Cette quête est signe de vie, si l’on accepte de sortir d’une volonté de maîtrise et d’agencement, pour accueillir ce qui fait sens au travers de toutes les expériences créatrices du quotidien, c’est-à-dire ce qui permet d’approcher, de conforter, d’enrichir et de laisser évoluer son propre sentiment d’identité. La principale visée de la cure psychanalytique est donc de rendre à l’être sa mobilité psychique ; certainement pas d’organiser son moi pour qu’il soit – apparemment - fort et possède un savoir pour faire face aux difficultés de l’existence.

La psychanalyse ne donne pas de recettes, ni contre l’angoisse, ni contre la souffrance, ni contre le doute. Elle ouvre l’horizon de la vie, elle donne à l’être le goût d’oser ses désirs et le courage de les confronter à la réalité, de les affirmer tout en sachant que peut-être ils ne trouveront pas si facilement et si tôt à se mettre en œuvre, à s’incarner comme le rêve les avait dessinés. Il n’est de rêve, comme il n’est de désir, que dans la transformation, dans l’ajustement de l’être humain au va et vient des possibles.

Très loin de tout effet miracle, la cure psychanalytique permet au sujet d’étoffer la confiance dans sa capacité créative à mettre en jeu, à chaque instant, la part de son désir qui exprime ce qui peut féconder ici et maintenant sa relation à l’autre et son rapport au monde. Cette sereine assurance laisse se déployer en soi l’énergie d’être là, situé avec justesse, dans un mouvement et par une parole dont chacun peut répondre, au moins partiellement, sans se trahir soi-même.

Alors, peut-être que finir une psychanalyse serait se sentir désirant de quitter un cadre limité et privilégié, pour mettre en circulation dans la totalité de sa vie, une attitude juste, centrée, authentique et courageuse. Poser sa liberté (re)trouvée en actes qui expriment sa propre identité et qui la nourrissent en retour.

C’est dans la relation continue et fluide avec son soi profond que le sujet se donne à être à la fois dans la plénitude et la précarité de son humanité.

Ainsi, être capable d’aimer et de vivre, sans forcément attendre en retour.

Sans nécessairement devoir s’attacher à quelque certitude.

La psychanalyse n’apporte pas de réponse : elle en rend le besoin inutile.

La psychanalyse n’est qu’un chemin vers l’être …

saverio tomasella
juin 1999

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